Ceux qui ont lu Deus Ex Machina de Pierre Ouellette comprendront mieux que les autres : le fantasme central est celui d’une machine accédant à la conscience. Jusqu’ici, ce scénario appartient entièrement à la fiction. Et pourtant, beaucoup s’y accrochent, comme si l’IA actuelle portait déjà la promesse — ou la menace — d’un tel saut.
Le rêve de la conscience artificielle
Ce qui fascine, ce n’est pas ce que l’IA fait réellement — trier, imiter, recombiner — mais ce que l’on imagine qu’elle pourrait devenir : un esprit indépendant, un alter ego numérique capable de jugement, de désir, d’invention. Pour certains, cette projection est un rêve ; pour d’autres, un cauchemar. Dans les deux cas, ce n’est qu’une illusion.
Une machine sans vie
L’IA ne ressent rien. Elle n’a ni faim, ni peur, ni mémoire vécue. Elle ne connaît ni la douleur, ni la perte, ni la joie. Elle calcule, simule, produit. Ses résultats peuvent impressionner, mais ils ne naissent d’aucune expérience intérieure. Ceux qui croient y voir une conscience sont trompés par l’échelle : ce qu’ils observent n’est qu’une galerie de miroirs statistiques.
L’industrie derrière le « miracle »
Et il ne faut pas oublier la machinerie derrière l’illusion : serveurs engloutissant de l’électricité, mines éventrant des métaux rares, équipes d’ingénieurs, factures d’énergie astronomiques. Rien de divin, rien de spontané : seulement de l’industrie lourde, matérielle et polluante. Parler de « miracle technologique » sans reconnaître cette réalité est une omission bien commode.
Une superstition moderne
La plupart de ceux qui pérorent sur l’IA ne l’ont jamais pratiquée. Ils n’ont pas vu ses erreurs, ses inventions, ses limites. Ils imaginent un oracle, alors qu’en pratique elle exige vérification, correction, cadrage. La foi aveugle en son omniscience n’est rien d’autre qu’une superstition moderne, guère différente des cultes religieux d’autrefois.
Une perspective lucide
La vérité est plus simple : l’IA n’est pas une conscience. Elle ne sauvera pas l’humanité, pas plus qu’elle ne la détruira. C’est un outil — puissant, certes, mais borné, et entièrement dépendant de ceux qui s’en servent. Le danger ne réside pas dans la machine, mais dans la cupidité et la crédulité de ceux qui s’imaginent qu’elle est plus qu’elle n’est.
Et alors ?
Le mythe de la machine consciente est séduisant, mais il reste un mythe. En réalité, l’IA d’aujourd’hui n’est ni un miracle ni une menace surnaturelle. Elle est un miroir : elle reflète nos fantasmes, nos peurs, nos illusions. Tant que nous la traiterons comme une divinité — qu’elle soit bienveillante ou malfaisante — nous resterons prisonniers de nos propres fables.
Alors : rions de l’idole. Voyons les câbles. Dévoilons l’illusion. Utilisons l’outil sans nous agenouiller devant lui. Plus on apprend à déchirer le voile mystique, moins l’IA a de pouvoir sur nous.
Et n’oublions jamais que la main qui tient le couteau est toujours plus dangereuse que le couteau lui-même.
Arashi Wanderer Ryō
(Hōrō-sha)
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Je suis membre actif de la Church of Satan. Mes propos n'engagent que moi : je ne parle pas au nom de l'organisation.
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