On veut (faire) croire qu’on vaut mieux.
Qu’on est « authentiques ». « Entiers ». Et sans aucune zone d'ombre.
C’est joli sur un profil, ça fait frissonner les naïfs, ça donne l'occasion de montrer des dents impeccables dans un sourire qu'on veut innocent et accueillant.
En vérité ? On se maquille tous la bouche pour couvrir l’odeur de sang ou du vomi.
L’hypocrisie sociale est notre parfum de ruche, à nous autres humains :
sucré au premier abord, vénéneux à la deuxième inspiration.
On sourit à qui l’on méprise.
On applaudit ceux qu’on rêve d’étrangler.
On bénit des pactes qu’on sabote à la première faille.
Ce n’est pas nouveau - c’est organique.
Une meute civilisée qui se convainc qu’elle danse autour d’un feu,
alors qu’elle tourne autour d’une carcasse à peine tiède.
Certains appellent ça du tact, d’autres de la stratégie.
Moi j’appelle ça une armée de loups déguisés en colombes.
Avec de la soie sur les crocs.
L’hypocrisie est le lubrifiant discret du darwinisme social :
elle évite les effusions directes, mais entretient la hiérarchie.
Elle permet de monter sans bruit, de régner sans duel,
de pousser le plus faible hors du cercle sans laisser de trace.
On pense éviter la guerre en mentant.
On la diffère. On la distille, goutte après goutte,
jusqu’à ce qu’elle suinte dans les coins :
réunions, couloirs, secrets, absences de réponse...
C'est-à-dire : tout l'écosystème de notre environnement toxique, que nous déplorons tant par ailleurs.
On se rassure : « C’est humain. »
Oui, c’est humain, parfois trop humain. Et c’est beau, mais rarement.
Parce qu’il faut bien survivre —
mais qu’on ne vienne pas me vendre ça sous le nom de bienveillance.
Rien de plus élégant qu’un couteau franc.
Rien de plus vulgaire qu’un poison lent.
Alors, qu’on s’empoisonne, mais qu’on l’admette :
l’hypocrisie est notre velours. Notre vernis. Notre lit.
Et notre instinct de bête — poli pour être compatible sur nos lieux de travail, nos interactions contraintes au quotidien.
Mais qu’on n’oublie pas :
une telle « gestion de risque », lorsque l'on pousse le raffinement trop loin, finit toujours par lâcher ses chiens.
La violence contenue trouve toujours un endroit où mordre.
On nous dit souvent, comme pour nous rassurer, que ce qui ne nous tue pas nous rend plus forts.
On oublie d’ajouter que cela nous laisse également à découvert.
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Je suis membre actif de la Church of Satan. Mes propos n'engagent que moi : je ne parle pas au nom de l'organisation.
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